Isabelle Lerin-Basset, DRH e.Voyageurs SNCF

Expérience candidat, recrutement, fidélisation : les RH d’e.Voyageurs SNCF tirent les enseignements de la crise… Un exemple pour le bâtiment ?

« Nous sommes par essence une entreprise digitale native. Dès le 15 mars 2020, au premier confinement, nous avons été en capacité de basculer l’ensemble de nos collaborateurs en télétravail. Nous étions techniquement prêts. Mais nous n’étions pas prêts à ne plus nous voir, à ne plus interagir et communiquer en direct ». Ainsi a résumé début février Isabelle Lerin-Basset, DRH de e.voygeurs SNCF lors d’un séminaire, toute la problématique de la gestion des salariés pendant la crise sanitaire.

Créée en octobre 2018, e.Voyageurs SNCF, filiale digitale de la SNCF est une start-up paradoxale. L’entité, ex – Voyages-sncf.com, regroupe aujourd’hui les plateformes client Oui.Sncf, l’Assistant SNCF et Rail Europe et compte en fait 20 ans d’activité digitale. C’est sur la première mouture de ce site que nombre de Français ont effectué leurs premiers achats de billets en ligne. La filiale Client de la SNCF aligne aujourd’hui 1500 collaborateurs dont de nombreux experts des mobilités autour des sujets technologiques et digitaux (développeurs Java et mobile, ingénieurs de Production DevOps, ingénieurs data, Delivery Managers, UX/ UI Designers, Product Owners, experts Webanalytics, e-CRM…) sur ses trois sites de Paris, Lille et Nantes. La structure a réalisé un volume d’affaires de 5 milliards d’euros en 2019.

Pour autant, assure Isabelle Lerin-Basset, e.Voyageurs SNCF « a su garder son ADN de start-up ». Et s’appuyer sur ses antécédents d’innovation et ses origines basées sur la mobilité pour adapter l’organisation du travail dans le dur de la crise sanitaire.

Accompagnement du télétravail : le principe du « tous ensemble » et du « tous à distance »

Premier acte, le renforcement du télétravail mis en place depuis 2012 : un nouvel accord de télétravail co-construit avec les collaborateurs et représentants syndicaux vise à donner plus de souplesse et d’autonomie aux collaborateurs, des conditions de travail à domicile similaires à celles du bureau, et les mêmes droits et devoirs en télétravail ou sur site.

Concrètement, les collaborateurs ont la liberté de prendre trois jours par semaine en télétravail sans validation hiérarchique et doivent aussi, une fois par semaine à minima être tous présents et tous en distanciel, ( à l’échelle d’une équipe). Au menu également, des dispositifs d’accompagnements spécialisés pour former les cadres au management à distance, la création d’un numéro de soutien contre l’isolement au travail, etc.

L’instauration de nouveaux « rites » a également été décisive pour accompagner cette évolution : culture du « feed-back », via un sondage hebdomadaire auprès des collaborateurs, organisation de contacts d’une demi-heure de façon régulière pour maintenir la cohésion, élaboration ludique d’un « JT » interne, etc.

Accélération du recrutement – Acquisition de talents

« Le recrutement ne s’est pas arrêté en 2020. OUI.sncf, notamment répond à environ 2500 postulants par mois. Or, nous sommes une entreprise technique et digitale et travaillons donc sur un marché de pénurie. A fortiori depuis la crise sanitaire, qui a vu la forte montée en puissance du e.commerce. Nous sommes en quête des mêmes ressources que les pure players et leaders de la vente en ligne, des profils encore plus demandés qu’auparavant », souligne la directrice RH. En 2021 En 2021, e.Voyageurs prévoit d’embaucher 150 développeurs « back end » et « full stack » ou encore des graphistes et web designers. Les process ont dont été basculés en distanciel, assortis d’un processus d’accueil spécialement dédié aux collaborateurs potentiels.

Rester attractifs : l’accélération de la démarche d’accompagnement au service de talents

« Les candidats doivent être motivés à rejoindre une entreprise qui leur renvoie la même qualité d’expérience que celle des clients. C’est le principe de la symétrie d’intention », souligne Isabelle Lerin – Basset. Dans le cas de e.Voyageurs, entreprise digitale et mobile par nature, il s’agit de déployer les valeurs afférentes à tous les niveaux des RH. Pour rester attractifs et fidéliser des candidats bien souvent eux aussi digital natives, habitués à travailler en mode agile, pétris de culture « start-up ».

Ainsi, la filiale de la SNCF organise des hackatons tout au long de l’année pour donner naissance à des projets collaboratifs et cultive les jeunes pousses, via son propre accélérateur de startups, 24 incubés en 2020. Un écosystème (hackathon, POC, test & learn, feature teams, heures de l’inno) afin que les collaborateurs restent au contact de nouveaux savoir-faire pour penser la mobilité de demain. « On joue sur la mobilité, la richesse des projets, leur sens. Les jeunes générations y sont très sensibles », résume la responsable RH.

Dans cette perspective l’entreprise a notamment poussé l’année dernière un projet de « smart office » consistant à élaborer un environnement de travail adapté aux usages en évolution.

Quelles pratiques pérenniser après la crise sanitaire ?

Les attentes des candidats ont évolué avec cette crise qui bouscule les modes de travail et de management. « On tend vers le sur-mesure, indique encore Isabelle Lerin-Basset, en utilisant un éventail d’outils. La totalité des candidats qui postulent chez nous reçoivent notamment une newsletter bimestrielle pour maintenir un lien ».

Sur le volet télétravail, tout a été dit, ou presque. Il semble cependant qu’un nomadisme maîtrisé, bien dosé, pourrait perdurer après la pandémie. Chez e.Voyageurs, ce qui fonctionne c’est le 100 % tous ensemble ou 100 % tous à distance. Bien mieux qu’un mix des deux. L’autonomie conférée aux collaborateurs dans la gestion de leur planning « présentiel-distanciel » paraît également une avancée quand elle est bordée par un jour par semaine sur site comme hors site, encore fois « tous ensemble, en même temps». Le modèle idéal pour e-voyageurs s’apparentant donc à un panaché entre alternance, autonomie et cohésion des équipes. Bref, la souplesse dans l’organisation est aussi une constituante du bien-être au travail.